✽ Au royaume des cartes, habite un Joker ✽

Elles étaient belles, les lumières de ces néons fluorescent, tandis que l'obscurité de la nuit venait tout juste de s'étendre. Elles luisaient comme un phare, attirant les esprits qui papillonnent. Camille en était un bon exemple. Il aimait les endroits de la nuit pour une raison qui lui échappait. Malgré certains que l'on aurait pu aisément qualifier de "dangereux", le garçon trouvait toujours le moyen de s'y faufiler. Il avait pensé que pour le Casino, ça aurait été plus facile. Vraisemblablement, on l'avait désigné trop jeune pour entrer. Alors, Camille se trouvait là, aux abords de la ruelle adjacente, observant l'entrée, soigneusement emmitouflé dans son sweat rouge, la capuche fermement visée sur son crâne; il commençait à avoir froid. Il n'allait pas déclarer forfait si vite, têtu qu'il était. A moins que son attention de fut attirée ailleurs, il ne lâcherait pas l'affaire. Seulement voilà, l'entrée était bien gardée et il ne songeait pas à l'arrière. ça doit être pire ... non ?
En soit, il n'avait rien à perdre, de plus, la pluie commençait à tomber. Le Petit Chaperon Rouge s'avança alors dans la ruelle, la semelle de ses chaussures clapotant dans le sol qui s'humidifiait déjà, sûrement à cause de la crasse. Quand il pleuvait, la lumière prenait une teinte diffuse, comme si elle se diluait entre les gouttes. Camille n'eut pas le temps de s'extasier plus longtemps que l'ondée s'accentuait. Il cligna des yeux en recevant cette eau du ciel sur le nez et les pommettes avant de s'empresser de baisser la tête, essuyant ses joues du dos de la main. Ses prunelles lorgnait vers une porte. Il devait y en avoir une. Peut-être même plusieurs. Il fallait bien un passer pour les employés, et faire entrer les caisses de boissons et de nourriture. Et, le miracle se présenta enfin sous la forme d'un accès dissimulé aux yeux des clients. Camille furetait, se colla soudainement contre un mur, oubliant qu'il risquait fort de salir ses vêtements. Il voulait savoir si la porte était ouverte mais, craignait de tomber nez à nez avec un employé s'il s'approchait comme ça. Il y avait des cartons vides, empilés sur le côté de l'entrée, alors, le garçon se glissa derrière, se recroquevillant. Finalement, la porte s'ouvrit. Plusieurs fois. Ils faisaient entrer justement des boites. Pour un tel passage, l'accès devait sûrement rester ouvert. Ainsi, le petit chaperon rouge prit son mal en patience. Attendant que les allées et venues se calment, trempant progressivement le tissu de ses vêtements, pour, finalement, passer furtivement le seuil du casino, le souffle retenu, comme si cela pouvait l'aider à être plus discret.
Il y avait foule, à l'intérieur, pourtant, Camille parvint à atteindre la grande salle de jeux. Lui-même ne savait comment. Les yeux écarquillés, il dévorait du regard les belles décorations luxueuses, les nombreuses lumières et buvait la multitude de sons qui s'échappaient çà et là. Il ne savait même plus où donner de la tête. Il avait envie de tout voir, tout essayer. Le chaperon avançait en ligne droite, traversant la foule. Il avait même oublié qu'il devait se faire discret, beaucoup trop émerveillé par ce qui l'entourait. Malheureusement. Combien de chances y avait-il pour que l'agent de sécurité qu'il lui avait interdit d'entrer se trouvât maintenant juste sur son chemin. Les regards se croisèrent.
Camille devait courir.
Et il courut, immédiatement, comme s'il avait le plus terrible des loups à sa poursuite, se frayant un chemin à travers la populace, aidé par sa frêle stature. Au moins pouvait-il gagner un peu de temps de cette façon. Il s'insinua entre deux machines, quittant le champs de vision de l'homme, qui n'était sûrement plus seul à sa recherche désormais. Camille savait qu'il devait trouver un échappatoire, un recoin où se cacher en attendant que la chasse se calme. Le Petit Chaperon Rouge n'aimait pas être le gibier. Pas encore. Il atteignit une porte de service qui était, miraculeusement, ouverte. Le long escalier qui s'en suivait fut rapidement grimpé. Camille repris juste son souffle une fois arrivé au sommet. Il n'avait jamais été grand sportif. Puis, avança prudemment le long des couloirs, guettant le moindre son qui pouvait le prévenir d'un passage soudain. Des pas, au loin, passant la même porte que celle qu'il avait empruntée tantôt. Malgré lui, les battements de son cœur s'emballèrent douloureusement, à la façon de celui d'un petit oiseau. Alors, il passa la première porte qui lui vint sous la main et qui paraissait ouverte. Se précipitant à l'intérieur, il ne tarda pas à fermer la porte en vitesse pour coller son front contre celle-ci, retenant son souffle et écoutant attentivement ce qu'il se passait à l'extérieur. Lorsque les pas s'éloignèrent, il se permit d'inspirer profondément, fermant les yeux.

Il ne savait pas qu'il venait entrer dans un bureau.
Occupé.